Le « couple » Marina Abramović et Frank Uwe Laysiepen, alias Ulay, se forme en 1976, après une rencontre fulgurante en décembre 1975, alors que Marina Abramović réalise une performance à Amsterdam. Tous deux nés un 30 novembre, ils ont, douze ans durant, une relation symbiotique et une pratique artistique totalement dévouée à la performance. Ils font de leurs corps leur médium, parlant d’eux-mêmes comme d’un « androgyne ». La performance Rest Energy est exécutée à une date charnière marquant la fin des relation works et le début de l’« épuisement de la relation ». De cette action restent vidéo et photographie. « La flèche est dirigée vers le coeur de Marina. De petits microphones sont attachés à chacun de nos coeurs, enregistrant le nombre croissant de battements de coeur. » Le corps des artistes met en tension l’arc, moderne Cupidon, qui frappe sa victime d’une flèche empoisonnée. Ce face-à-face en temps réel est, aux dires de Marina Abramović, une des pièces les plus difficiles à performer. Une seconde d’inattention, et c’est la mort.
L’image immobile, en plan serré, est induite par l’objet de la performance du duo. Celui-ci évoque les difficultés à trouver un équilibre, les tensions inhérentes à cette quête et l’interdépendance du couple. On y retrouve le vocabulaire dichotomique conjugué par Ulay et Abramović tout au long de leur carrière commune, favorisant une image à la fois mentale et sentimentale.
En 1988, le couple scénarise la fin de sa relation : une marche de 2000 kilomètres chacun, pendant 90 jours sur la muraille de Chine, The Lovers : The Great Wall Walk. Marina part de l’est, aux abords de la mer Jaune. Ulay part de l’ouest, du désert de Gobi. Jusqu’à se retrouver, pour « se séparer et se dire adieu ».
J.B.