Michel de Broin

2005
72 chaises en plastique
et métal, système d‘attache
Diamètre : 400cm
Collection MAC/VAL,
musée d’art contemporain
du Val-de-Marne.
Acquis avec la participation du FRAM Île-de-France.
Photo © Jacques Faujour.

Notice

Par le biais de la sculpture, de l’installation mais aussi de la vidéo et de la performance, Michel de Broin questionne, depuis le milieu des années 1990, le contrôle de l’espace symbolique et social, la construction de la réalité par la maîtrise du langage. À partir d’objets communs mais investis d’une charge sociale, émotionnelle ou érotique, l’artiste invente des systèmes mettant en jeu des forces qui s’attirent, se repoussent ou se supportent. Le titre Black Whole Conference amalgame, par homophonie, le phénomène scientifique du trou noir (black hole) et l’idée de discussion collective. Défini comme une absence de matière, le trou noir fait partie d’une représentation consensuelle du monde. Illustré ici par une conversation qui tourne à vide, il soulève la question de l’autorité du discours. L’installation consiste en un groupe de chaises fixées une à une par les pieds de manière à former une sphère. Chaque élément de cette architecture utopique assure et partage solidairement la stabilité de l’ensemble. Dans un idéal chevaleresque, la forme de cette assemblée, à l’image de celle de la Table ronde du roi Arthur, évite toute préséance, garantissant une parfaite égalité entre ses membres.

Paradoxalement ou comme un aveu d’échec à parvenir au consensus, il est physiquement impossible de siéger à cette assemblée fictive qui, toutes griffes dehors, semble préférer l’autarcie. À travers la sphère, l’artiste convoque l’histoire et la mémoire de la pensée de l’homme occidental, le globe comme image ou objet pour représenter le monde (céleste puis terrestre) forçant l’adhésion et obligeant l’homme à chercher sa position par rapport au point central. La place extérieure du spectateur face à l’oeuvre de Michel de Broin rappelle la situation de l’homme tenté de préférer à l’expérience de la réalité une vie fictive de spectateur.

Comme pour boucler la boucle, le modèle de chaise choisi pour cette sculpture permet à l’artiste de relier à la globalisation mathématique vieille de deux mille ans la globalisation terrestre et économique actuelle. Ersatz de la chaise Polyprop créée par le designer britannique Robin Day en 1962, cette référence du design moderne est devenue un objet standard, signe mondial du milieu professionnel et de la collectivité, reliquat d’une utopie moderniste qui entendait faire du beau un consensus. Produite à plus de 14 millions d’exemplaires, cette chaise est aujourd’hui un emblème parmi d’autres d’une économie globalisée.

L.H.

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