Un an après son ouverture, le musée propose aujourd’hui d’envisager un autre pan de la collection, un autre regard sur la scène artistique en France, mais aussi une autre façon de vivre le bâtiment et d’y rencontrer les œuvres. Il s’agit de prolonger le premier accrochage en situant toujours le visiteur au cœur des œuvres et de leur apparition. Mais c’est maintenant un face-à-face qui s’établit ; pour se retrouver face à soi, et face aux autres, avec des œuvres qui traitent du corps, de sa présence au monde, de sa représentation, du regard donc. Implanté dans le Val-de-Marne, le musée résonne avec ce territoire de banlieue, composé de villes en devenir, de populations en mouvement qui reflètent leurs origines et cultures diverses. Les artistes racontent et tissent notre culture commune, c’est à travers eux que nous pouvons nous retrouver. La présence au monde qu’ils mettent en œuvre peut être en résonance étroite avec lui, descriptive, documentaire ou critique. Elle peut aussi être métaphorique, poétique et distanciée. L’artiste peut éclairer sans montrer, révéler sans dire.
Nous poursuivons aujourd’hui cette relation étroite entre la vie et la création en conviant des œuvres d’artistes qui composent la scène française depuis cinquante ans. Certains des acteurs de cette histoire sont maintenant disparus. Ils en restent pour autant une partie essentielle et la marquent, comme le fait la présence de Gina Pane, au fer rouge. Cette partition se compose d’ensembles d’artistes, de réunions de leurs œuvres au fil de leurs points de rencontre.
Entre hier et aujourd’hui, entre un passé proche et un présent en devenir, la collection se déploie dans ce nouvel accrochage où les œuvres, de toutes formes, sont rassemblées autour d’une histoire commune pour évoquer la question de la présence au monde : la présence de l’artiste, par son regard en premier lieu, en creux donc. La présence de chacun aussi à travers la représentation de l’être, du corps : la figure. La figure rassemble et sépare en même temps : longtemps sujet exclusif, elle se perd dans une histoire de l’art qui l’abandonne pour mieux la retrouver. Elle cristallise les attitudes artistiques, repousse puis attire à elle les avant-gardes.
Elle anime donc notre histoire récente et ponctue les œuvres de sa présence, figurée ou en creux. Elle parle de soi, de l’autre, et renvoie une image, un reflet parfois. Ce nouvel accrochage est une proposition de regard, un point de vue. Encore une fois, il y en a mille autres, et c’est à chacun d’approcher les multiples sens d’une œuvre avec les conférenciers du musée, les visites d’autres artistes, les textes des auteurs littéraires ou critiques invités.
Car c’est véritablement ce que nous souhaitons proposer : un point de vue qui n’est qu’une ouverture, un accompagnement qui permette d’aller plus loin, de se faire son idée, sa propre vision. Pas d’histoire préécrite, pas de vérité non plus.
C’est une histoire en devenir que celle de l’art, comme celle d’un musée et de sa relation à l’autre, à inventer.
Alexia Fabre, Conservateur en chef