Œuvres

Aleksandra Mir

First Woman on the Moon

Alors que sont célébrés les trente ans des premiers pas de Neil Amstrong sur la lune, Aleksandra Mir met en scène son propre alunissage et réactive avec humour le contexte de la guerre froide. Un polder hollandais, plage artificielle et symptôme de l’expansion humaine, est façonné jusqu’à ressembler au paysage lunaire que foulait l’équipe de la mission Apollo 11 en 1969. Le film est accompagné d’une musique homérique et fantastique associée aux enregistrements originaux des communications des équipes de la NASA. Entre documentaire et fiction, la vidéo, confinant parfois à l’absurde, aborde avec ironie et poésie l’irrésistible marche humaine vers toujours plus de conquête. L’aérospatiale figure parmi les cibles de détournement favorites de l’artiste qui vise les symboles de la domination impérialiste et patriarcale.

First Woman on the Moon

August 28, 1999
Produit par Casco Projects à Wijk aan Zee, Pays-Bas
Vidéo documentaire, 12’, 1999
Courtesy de l’artiste et Galerie Laurent Godin, Paris.

Clarisse Hahn

Notre corps est une arme – Los Desnudos (Mexique)

Los Desnudos fait partie, avec Gerilla et Prisons, d’une « trilogie » intitulée « Notre corps est une arme ». Gerilla documente les activités de jeunes guérilleros kurdes du PKK à la frontière de la Turquie et de l’Irak, puis celles de jeunes émigrés kurdes à Paris. Dans Prisons, Clarisse Hahn revient, sur le mode de l’interview, sur l’assassinat de prisonniers politiques orchestré par l’État turc au cours d’une opération nommée « retour à la vie » en 2000.
Toujours sous la forme documentaire, la double projection vidéo Los Desnudos témoigne de la lutte des paysans du Veracruz (Mexique), contestant les expropriations et spoliations de leurs terres dont ils ont été victimes. Les paysans campent sur une place publique de Mexico et défilent nus, chaque jour, la photo d’un politicien en guise de cache-sexe.

Notre corps est une arme – Los Desnudos (Mexique)

2011.
Installation vidéos, 2 écrans.
© DR.

Frédéric Nauczyciel

Vogue ! Baltimore # Kory Goose Revlon

Frédéric Nauczyciel a travaillé pendant plusieurs mois avec la communauté noire queer de Baltimore à la rencontre de ceux qui continuent d’inventer le Vogueing, une danse, performée, et plus largement un mode de vie, nés dans les quartiers noirs et latinos de Harlem dès les années 1960. L’enchaînement virtuose des poses de mannequins, majoritairement blancs, du magazine Vogue, infuse une forte charge critique et contestataire. En 1990, le phénomène a été « popularisé » par Madonna dans son clip Vogue et traité dans le documentaire de Jennie Livingston Paris Is Burning. Les vidéos de Frédéric Nauczyciel, réalisées avec son iPhone, plongent le spectateur dans ce monde parallèle mais bien réel des ghettos de Baltimore : des « bals » où se défi ent les voguers, qui flamboient en « donnant leur vie » pour devenir« légendaires »… Une poétique de la survie… En contrepoint, un long travelling montre la ville de Baltimore de jour. Une série de portraits réalisés en studio, qui déconstruisent les mouvements du Vogueing, accompagne l’installation.

Vogue ! Baltimore # Kory Goose Revlon

2011.
Programme Hors les Murs - Institut Français.
Avec le soutien du Eubie Blake
Centre (Baltimore), Honfleur Gallery (Washington), L’Alliance française de Washington.
Photo © Frédéric Nauczyciel.

Jakob Gautel

Maria Theodora

L’installation de Jakob Gautel prend comme point de départ une photo de famille datée des années 1860. Son ancêtre métisse Maria Theodora, née en Indonésie de l’union d’un médecin allemand et d’une indigène, se fait photographier peu de temps après son arrivée sur le continent européen. Menant une quête identitaire marquée par des questions d’impérialisme et de mixité, l’artiste a entrepris un travail multiforme pour brosser les traits de son aïeule. Entre 1996 et 1997, Jakob Gautel photographie des modèles européens et asiatiques en suivant la composition et le style du cliché familial. Dans la vidéo intitulée Batavia (nom de Jakarta à l’époque des Indes orientales néerlandaises), un personnage fantomatique vêtu d’une réplique de la robe de Maria Theodora déambule dans les rues de l’ex-cité coloniale. Une collection d’objets et de notes évoque à son tour la figure énigmatique de Maria Theodora, que la fiction et la narration tentent de faire revivre en même temps qu’elles brouillent la véracité des faits.

Maria Theodora, 1862-1863 / 1996-1997

Une photographie sépia et 120 photographies noir et blanc.
Dimensions variables.
© DR.

Johanna Billing

ou Don’t love me yet

L’artiste conceptuelle suédoise travaille essentiellement avec la vidéo et la musique, elle a longtemps géré un label musical indépendant et s’intéresse tout particulièrement aux pratiques amateurs, aux interactions entre les gens et à la nature de la collaboration. À travers l’un de ses projets les plus ambitieux, You don’t love me yet, elle demande à des groupes de musique d’interpréter la chanson éponyme composée à l’origine par Roky Erickson et qui apparaît sur l’album All that may do my rhyme (1995). Chaque « concert-performance » est filmé dans son intégralité et la centaine de reprises live qu’elle accumule depuis maintenant dix ans est présentée sous forme documentaire (DVD), consultable lors des expositions. À chaque fois, la même ritournelle, mais toujours différente, interrogeant la notion d’original, de copie, d’interprétation, d’originalité et de droit d’auteur. S’ajoute à ces archives un film qui retrace l’enregistrement collectif en studio du single (2003).

ou Don’t love me yet

2002 – 2012.
Installation multimédia.
Vue de l’exposition « Situation(s) »,
MAC/VAL 2012. Photo Martin Argyroglo.

Marcello Maloberti

The Ants Struggle on the Snow

Les vidéos présentées par Marcello Maloberti ont été réalisées en 2009 pour Performa, la biennale de performance de New York. Ces vidéos, aux bandes sonores euro-dance, présentent des processions déambulant aux allures de carnavals improvisés dans l’espace public. Véritable représentation participative, cette performance emprunte à la danse et aux codes de la fête les rites jubilatoires d’une exécution collective. Les protagonistes forment un groupe hétéroclite d’une trentaine de personnes comprenant amis, bénévoles, passants, six joueurs de basket-ball, un groupe d’adolescents, ainsi que l’artiste lui-même. Chaque intervenant, apportant ou transportant un objet simple considéré comme le prolongement de son propre corps, se voit attribuer, le temps de la performance, le statut de l’artiste. Ensemble, ils vont tous former une ligne composite et plurielle, donnant une carnation à l’anonymat et un sens à la vacuité des grands ensembles urbains.

The Ants Struggle on the Snow

2009.
Performance à Performa 09, New York.
Courtesy of Performa et l’artiste.
Photo © Gisella Sorrentino.

Marylène Negro

Et maintenant : 06 21 58 43 67

Avec Et maintenant : 06 21 58 43 67, Marylène Negro lance une invitation au passant et donne la parole aux détenteurs de téléphones portables. Pour répondre à cette sollicitation, il suffit d’envoyer un SMS et de laisser libre cours à son imagination. Les messages reçus restent anonymes, ils sont retranscrits en direct sur un écran et tracent une cartographie intime et mentale des participants. Chaque message chasse le précédent, le flux d’informations investit l’écran, mais rien n’est archivé. À l’inverse, Daymondes s’écrit comme un journal d’images filmées et invite à trouver sa place dans le flot médiatique actuel. Pendant trois mois, Marylène Negro a acheté le quotidien Le Monde et s’est intéressée à son iconographie. Au gré de ses manipulations, elle dévoile lentement les images, décèle des points d’entrée et se fraie un chemin.

Et maintenant : 06 21 58 43 67

2012.
Production MAC/VAL. Vue de l’exposition « Situation(s) »,
MAC/VAL 2012.
Photo Martin Argyroglo.

Matthieu Laurette

I am an artist

Les papiers à en-tête, provenant des hôtels des différents pays dans lesquels Matthieu Laurette a séjourné pour des raisons professionnelles, sont tous signés d’une même phrase. Sur chacun des documents est inscrit, sur le mode de la déclaration et dans la langue du pays correspondant, s’il la parle, « Je suis un artiste ». Cette série d’oeuvre questionne l’existence même de l’artiste en conditionnant ses apparitions. Parallèlement, Matthieu Laurette alimente de façon récurrente et aléatoire un compte Twitter, sur lequel il inscrit inlassablement la même mention depuis 2009 : « I AM STILL ALIVE. Matthieu Laurette. », en précisant la date et le lieu du tweet. En ritualisant des interventions qui tiennent de l’affi rmation de soi dans la sphère publique en tant qu’artiste, il s’agit de rejouer, non sans humour, une lignée conceptuelle sur des positions critiques vis-à-vis des codes traditionnels de la représentation d’un artiste et de son existence au sein même de la sphère médiatique.

I AM AN ARTIST

Stylo sur papier en-tête d’hôtel.
37,5 x 28,6 x 3,8 cm.
© Adagp, Paris 2012.

Melanie Manchot

Dance (All Night Paris)

Tout l’oeuvre de Melanie Manchot est traversé par la relation qu’entretient le corps (social) à l’espace (public) et les permanentes négociations entre ces deux notions. La vidéo Dance (All Night, Paris), filmée à Paris à l’occasion de Nuit Blanche 2011, dévoile une cour d’école aux allures français de guinguette qu’une multitude de danseurs vient occuper. Une dizaine de types de danse est convoquée (valse, rock, hip-hop, french cancan, tango…), chaque ensemble, casques aux oreilles et selon ses règles, s’approprie l’espace en rythme et en silence. Avec Perfect Mountain, l’artiste s’intéresse à la fabrique de l’image en même temps qu’elle pointe les limites du tourisme de masse. Dans un historique studio photo accroché à une montagne helvétique, on vient se faire tirer le portrait, en costume folklorique suisse. De nombreux Indiens viennent retrouver ici ce qu’ils ont vu au cinéma, puisque Bollywood a fait de la Suisse un Éden dont l’image stéréotypée sied parfaitement aux idylles romantiques.

Dance (All Night, Paris)

2012.
Vidéo HD, 12’30.
Production Nuit Blanche, Paris, 2011.
Collection FMAC Paris.
© Adagp, Paris 2012.

Tsuneko Taniuchi

Micro-événement n°14 /Love me tender

Tsuneko Taniuchi organise des cérémonies de mariage menées par un officiant et sanctionnées par un certificat authentifiant les échanges de voeux consentis. Ces mariages fictifs, menés comme de véritables célébrations solennelles, lient Tsuneko Taniuchi au partenaire de son choix, qu’il soit homme, femme ou même pluriel. Les photographies et les certificats exposés proviennent de plusieurs performances, dont Micro-événement n°26 /Je me marie en chinois, réalisée en 2005. De l’image stéréotypée des Asiatiques à celle des Occidentales, l’oeuvre aborde le statut de la femme d’aujourd’hui au prisme de l’institution qui définit le pacte social. Le mariage est à la fois un acte personnel et un acte social, sa portée est tout autant institutionnelle que contractuelle. En pensant le mariage comme un outil d’exclusion ou d’intégration, l’artiste l’investit d’une dimension politique et identitaire.

Retrouvez l’interview de l’artiste performeuse japonnaise Tsuneko Taniuchi pour ParisArt : L’artiste présente, dans l’exposition Situation(s) au Mac/Val, une installation intitulée Micro-événements de mariages. Ses performances « Micro-événements » interrogent la société, le politique et la culture en expérimentant la nature des relations humaines...

Micro-événements n°21 /Candidature en vue du mariage, 2003

Hôtel de Ville, Paris
Vue de l’exposition « Situation(s) »
MAC/VAL 2012
Photo Martin Argyroglo
© Tsuneko Taniuchi Adagp, 2020, Paris