Parcours #4, « Nevermore »

Le mot du Conservateur en chef

« Nevermore »

Ce titre en anglais pour une collection « française » est celui d’un des plus beaux poèmes de Verlaine, dont les premiers vers – « Souvenir, souvenir, que me veux-tu ?… » – m’ont été soufflés par Agnès Varda lorsque je lui ai parlé de ce nouvel accrochage de la collection dans lequel elle figurait.

Lié au souvenir, ce nouveau parcours raconte, pour fêter l’anniversaire du musée, en partie l’histoire de la collection ; il rappelle que la mémoire est sa mission, son sujet comme le sujet de toute collection publique. Cinq années déjà, au plus près des artistes, au plus proche de cette scène artistique que le MAC VAL est aujourd’hui le seul musée à défendre et à rendre visible : l’art contemporain en France, avec ses figures majeures, ses artistes en devenir, ceux dans la lumière comme ceux qui restent moins visibles, mais aussi ceux, étrangers, qui viennent enrichir « notre histoire » de l’art, invités dans les expositions, en résidence, puis dans la collection même. Aujourd’hui, pour se souvenir de l’inauguration du musée, nous proposons au public de retrouver certaines des œuvres qui en ont marqué l’ouverture, mais aussi de nouvelles arrivées. Toute collection étant chargée de raconter une mémoire pour constituer un patrimoine, en conjuguant passé, présent et futur en (au) même temps, nous choisissons aujourd’hui de regrouper les œuvres autour du thème du « souvenir ».

Se souvenir est bien le propre de l’homme, la mémoire constitue son ancrage sur Terre, sa densité, sa force et sa faiblesse, elle est individuelle, collective, partagée ou sélective, elle est « bonne » ou « mauvaise » et, tôt ou tard, elle flanche. Elle est faite d’images, de sons, d’impressions, de manques et de zones d’ombre. Elle est lumière, fulgurance, elle est silence. Un retour aux sources de la collection et aux artistes lumino-cinétiques a naturellement fait émerger cette idée : la lumière comme apparition et comme trace rémanente, comme inscription, comme jeu aussi et comme façon de positionner l’art dans la société des années 1960. De cette approche joyeuse et décomplexée des artistes du GRAV (Groupe de recherche d’art visuel) a découlé le sujet de la mémoire, plus mélancolique, mais toujours terriblement ancré dans la vie.

Le projet s’est dessiné comme un « tout », déclinaison au fil des espaces d’oeuvres liées à l’idée de la mémoire : un accrochage de fait plutôt noir et blanc, à la façon d’anciens portraits de famille, avec quelques jaillissements de couleur là où la lumière appelle la mémoire. Des oeuvres qui interrogent de façon singulière le rapport au temps, à l’absence, au manque, qui renvoient à la question de la trace, des œuvres qui constituent aussi des souvenirs en elles-mêmes : souvenirs d’un accrochage passé, d’un temps révolu. Un jeu teinté de nostalgie qui tisse le lien entre notre mission, consistant à fabriquer une mémoire avec un présent relatif et incertain, et l’histoire des œuvres.

Comme toujours dans les accrochages du musée, les formes artistiques et les générations d’artistes voisinent et se retrouvent autour d’un sujet commun. Des souvenirs à se raconter mais encore à tisser avec les artistes qui interviendront « au présent » dans la collection. Nous débutons aujourd’hui le projet « Featuring », un programme inventé pour son premier invité, Pierre Buraglio, en résonance avec son oeuvre mais aussi avec son amour du jazz. Pierre Buraglio est un des artistes les plus fidèles et les plus aimés de la collection du musée. Il a offert de nombreuses oeuvres au Département, en soutien au projet de musée. Aujourd’hui, il habite à nouveau le Val-de-Marne, retrouvant ainsi l’histoire de sa famille qui s’y est construite après le départ d’Italie, et il continue à faire partie de notre univers, poursuivant son oeuvre avec détermination et humilité, travaillant au corps la question de l’histoire, de la mémoire, de la trace, celle de l’absence. Aussi sa présence dans cet accrochage, en résonance avec l’anniversaire du musée, nous a semblé naturelle et essentielle. La fidélité, parce qu’elle fait mémoire, est un sujet que nous essayons de creuser au MAC VAL, en suivant les artistes, dans les liaisons substantielles entre la collection et les expositions temporaires, en maintenant avec les artistes venus en résidence des projets dans le temps, en créant des relations avec de plus jeunes artistes.

Ce sont ce plaisir et cette chance que nous voulons proposer au public : une rencontre hors du commun et de la normalité, hors des sentiers battus et des attendus, l’opportunité de rencontrer celles et ceux qui nous racontent le monde autrement, singulièrement, qui renversent les certitudes et dévoilent l’envers du décor.

Alexia Fabre, Conservateur en chef

Au premier plan à gauche, François Arnal,
La robe de chambre, la paire de ciseaux et les persiennes, 1965, 1967 et 1968.
Au premier plan à droite, Michel de Broin, Black Whole Conference, 2005.
Au fond, Sarkis, Le bateau Kriegsschatz, 1982-2005.
Collection MAC VAL, musée d’art contemporain du Val-de-Marne.
Acquis avec la participation du FRAM Île-de-France
Photo © Jacques Faujour.

Présentation

Nevermore

C’est à Paul Verlaine que nous devons ce titre mystérieux du Parcours #4 de la collection, intitulé “Nevermore”, titre emprunté à l’un de ses poèmes dont les premiers vers donnent le ton : “Souvenir, souvenir, que me veux-tu ?”... Lié au souvenir, ce nouveau Parcours raconte en partie l’histoire de la collection ; il rappelle que la mémoire est sa mission. Un jeu teinté de nostalgie, qui tisse le lien entre notre mission qui consiste à fabriquer une mémoire avec un présent relatif et incertain, avec l’histoire des œuvres. Des œuvres emblématiques de la collection (Gilles Barbier, Melik Ohanian, Christian Boltanski, Annette Messager, Claude Lévêque, Shilpa Gupta…) voisinent avec de nouvelles acquisitions (Shirley Jaffe, Djamel Tatah, Mark Brusse, Elisabeth Ballet, Renaud Auguste-Dormeuil, Claire Fontaine, Cyprien Gaillard…) – l’occasion pour le public de découvrir et redécouvrir la collection du MAC VAL. “Nevermore” propose une autre vision du monde à travers le regard des artistes !

Le propos de l’accrochage oscille entre mémoire et souvenir, sans qu’une nette frontière ne puisse être tracée entre les deux. Le parcours se déroule dans une ambiance noir et blanc, avec, par moment des touches de couleur rappelant le souvenir de l’instant, tel un flash. Très cinématographique dans sa construction, la scénographie du parcours privilégie l’approche décloisonnée des médias : peintures, sculptures, photographies, installations, vidéos se mêlent, jouant ainsi sur une approche poétique et narrative des œuvres. Aujourd’hui, pour se souvenir de l’inauguration du musée, pour fêter ce type de moments trop rares, certaines œuvres emblématiques de la collection (L’ivrogne de Gilles Barbier, The Hand de Mélik Ohanian, Les enseignes de Frank Scurti, Souvenir enroulé d’un matin bleu de Gina Pane …) sont à nouveau montrées mais également de nouvelles acquisitions sont présentées pour la toute première fois, manière de réaffirmer l’engagement du musée pris auprès des artistes. La collection s’enrichit ainsi années après années, pour dessiner un panorama de la création artistique en France, unique.

Une collection à l’image du territoire, riche, audacieuse, qui intrigue et suscite la curiosité – car pour s’approcher de l’autre, il faut être à l’écoute de ses différences. C’est en revenant aux sources de la collection et aux artistes lumino-cinétiques que cette idée est naturellement venue : la lumière comme apparition et comme trace rémanente, comme inscription, comme jeu aussi et façon de positionner l’art dans la société des années 1960. De cette approche joyeuse et décomplexée des artistes du GRAV a découlé le sujet de la mémoire, plus mélancolique, mais toujours terriblement ancré dans la vie. Mais aussi, l’invitation à Pierre Buraglio, l’un des artistes les plus fidèles et les plus aimés de la collection du musée, de participer à un featuring. Conçue comme une proposition légère, featuring est un accrochage de quelques œuvres clefs de Pierre Buraglio au sein de la collection, afin de les éclairer autrement.

La fidélité, car elle fait mémoire, est un sujet que nous essayons de creuser au musée, en suivant les artistes, dans les liaisons substantielles entre la collection et les expositions temporaires, en maintenant avec les artistes venus en résidence des projets dans le temps, en créant de nouvelles relations avec de plus jeunes artistes. Et c’est bien ce plaisir et cette chance que nous voulons proposer au public : cette rencontre hors du commun et de la normalité, hors des sentiers battus et des attendus, cette chance de rencontrer celles et ceux qui nous racontent le monde autrement, singulièrement, ceux qui interrogent le monde, renversent les certitudes et dévoilent l’envers du décor.

Hugues Reip

White Spirit (Black Soul)
2009-2010
Théâtre d’ombres composé de 3 carrousels,
3 écrans de rétroprojection et 30 silhouettes en PVC blanc,
180 x 310 cm (chaque écran).
Collection MAC VAL,
musée d’art contemporain du Val-de-Marne.
Photo © Jacques Faujour.

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Petit Journal
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Artistes de la Collection

Pierre Ardouvin
François Arnal
Renaud Auguste-Dormeuil
Élisabeth Ballet
Gilles Barbier
Christian Boltanski
Halida Boughriet
Anne Brégeaut
Michel de Broin
Mark Brusse
Pierre Buraglio
Claude Closky
Philippe Cognée
Noël Dolla
Sylvie Fanchon
Malachi Farrell
Nicolas Floc’h
Claire Fontaine
Cyprien Gaillard
Shilpa Gupta
Mona Hatoum
Éric Hattan
Christian Jaccard
Shirley Jaffe
Véronique Joumard
Alexei Kallima
Irina Korina
Thierry Kuntzel
Ange Leccia
Julio Le Parc
Les alternateurs volants :
Laurent Bolognini et
Françoise Henry
Claude Lévêque
Annette Messager
Joachim Mogarra
Jonathan Monk
Jacques Monory
François Morellet
Antoinette Ohannessian
Melik Ohanian
Gina Pane
Hugues Reip
Anri Sala
Sarkis
Vladimir Skoda
Pierre Soulages
Peter Stämpfli
Djamel Tatah
Bram Van Velde
Agnès Varda
Felice Varini
Jean-Luc Vilmouth

Collection de Vitry-sur-seine :

Michel Aguilera
Eléonore Cheneau
Todd Narbey
Antonio Segui
Michel Séméniako
Gérard Traquandi