Halida Boughriet

2009
Diptyque photographique,
impression directe encre UV sur dibond,
70 x 120 cm (chaque).
Collection MAC/VAL,
musée d’art contemporain
du Val-de-Marne
Photo © Jacques Faujour.

Notice

Halida Boughriet est une jeune artiste française qui a déjà trouvé sa voie et profondément ancré son œuvre dans l’état du monde, ses moments autoritaires que sont les guerres, le politique ou la religion, et leur empreinte sur les individus. Ses origines algériennes l’ont fait se construire dans la richesse de plusieurs cultures. Sources d’observation et d’interrogation, celles-ci lui permettent aussi de relativiser chacune de leurs données, à travers des gestes poétiques sur la nature de ce qui fonde les rapports humains.

Dès sa sortie des Beaux-Arts à Paris, puis à New York où elle étudie à la School of Visual Art jusqu’en 2005, son regard est photographique et vidéaste. Il saisit les hommes dans leur milieu, souvent urbain, révélant leurs fragilités, leurs doutes. Les relations ambivalentes, voire impossibles, entre les cultures du Nord et du Sud, au cœur de la vidéo Action (2003) que vient d’acquérir le Centre Pompidou, traduisent ces différences qui font que le toucher, geste tendu vers une main à peine effleurée, provoque une palette de réactions, de la plus violente à la plus retenue, en passant par tant d’indifférence.

Plus ou moins frontalement, ce sont les conflits et leurs cicatrices qu’Halida Boughriet traque dans ses résidences (Bosnie, Afrique, plus récemment Algérie), enregistrant la vie qui résiste, comme dans Dream City (2008), où les jeux d’enfants « repoussent » sur les terres brûlées, ou dans La Boîte à musique (2009), qui associe les témoignages des enfants et victimes de guerre à « une » image de l’enfance. Interrogeant la notion de « péché » à travers les cultures, l’artiste a commandé des textes à plusieurs écrivains et slameurs, textes dont la beauté souvent fulgurante oscille entre cette notion judéo-chrétienne et le concept de culpabilité.

Pendant sa résidence à Jijel en Algérie, elle réalise Maux des mots, inscrivant ces textes de souvenirs sur les dos d’un homme et d’une femme, à l’encre rouge. Telle l’histoire, l’encre est délébile et s’efface lentement dans le ressac de la mer où sont allongés les corps. Halida Boughriet confère aux images qui composent ce diptyque la magnificence orientale des icônes et un caractère sacré par le texte qui court et disparaît, à l’instar de la mémoire qui flanche et inéluctablement s’efface. Cetteœuvre en devenir brille de mille promesses grâce à la profonde humanité du regard d’Halida Boughriet comme à la liberté de ses points de vue et prises de position, toujours en empathie avec ceux que le monde marque au fer rouge.

A.F.

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Par Claire Bartoli